Chiens catégorisés : le bouc émissaire des autorités françaises

Les races de chiens les plus impliquées dans les accidents de morsure sont, sans surprise, les :

Berger Allemand
Labrador
Jack Russel

Je dis « sans surprise », car il s’agit tout simplement des trois races les plus répandues dans nos foyers. Il est donc logique que ce soit les plus impliquées dans les cas de morsure, n’est-ce pas ? Malheureusement, la logique est justement ce qui a manqué aux députés français quand il a fallu légiférer sur les morsures. Continuez à lire, j’y viens. Autre statistique intéressante : pour la grande majorité de ces accidents (78%), le chien était connu de la victime ; le plus souvent, elle se faisait mordre à l’intérieur de la maison. Oui, les morsures sont un réel problème. Oui, il faut des lois pour les prévenir. C’est d’ailleurs ce que le législateur français a fait en 1999… Avec une loi complètement absurde, aux conséquences désastreuses. Aujourd’hui, je dénonce cette loi obsolète, inutile et absolument néfaste – pour les chiens concernés comme pour les victimes de morsures. Une loi qui s’acharne sur les chiens à grosse mâchoire Voici le raisonnement logique que j’aurais eu si, en 1999, j’avais eu l’occasion de rédiger cette loi « anti-morsure ». J’aurais donc rendu obligatoires quelques heures de cours en éducation canine pour chaque adoptant. Comprendre son chien et respecter ses besoins est le meilleur moyen d’empêcher l’agressivité. Comme les enfants sont les premières victimes des morsures, j’aurais rendu obligatoire un programme de prévention anti-morsure dans chaque école. Une demi-journée par an, où on explique aux enfants ce qu’ils peuvent faire et ne pas faire avec le chien. Ensuite, pour les chiens mal sociabilisés et qui finissent malgré tout par mordre, j’aurais rendu obligatoires les cours d’éducation canine, en laissant l’éducateur décider sur

le port de la muselière
la stérilisation du chien, s’il juge que c’est nécessaire (car oui, dans quelques rares cas l’agressivité peut aussi être liée à des causes génétiques)

Et bien sûr, je me serais assuré que tous les éducateurs agréés pour prendre ce type de décision soient compétents et formés en éducation bienveillante. Mais voilà. Ce n’est pas la décision qu’a pris le législateur. Au lieu de ça, il s’est acharné sur les chiens qui avaient :

les plus grandes dents
la plus grosse mâchoire
la musculature la plus imposante.

À savoir : les chiens catégorisés. (Staff, Rottweilers…)¹ Depuis cette fameuse loi, ces chiens doivent être muselés à chaque fois qu’ils sortent de chez eux. Ils n’ont jamais le droit d’être détachés. Votre bailleur peut vous interdire d’en détenir un chez vous. Les Rottweilers, Staffs et compagnie sont-ils les chiens les plus mordeurs ? Non, absolument pas. On se demande où était la logique derrière cette loi. Les chiens catégorisés sont vus comme des monstres La loi sur les chiens catégorisés a-t-elle diminué le nombre de morsures ? Non – il est en constante augmentation². A-t-elle dissuadé les personnes d’adopter des chiens considérés par le législateur comme « dangereux » ? Bien au contraire : le nombre de personnes qui vendent ces races a explosé depuis cette loi³ . Et pour cause : certaines personnes ont délibérément voulu adopter un chien ‘méchant’. ‘Agressif’. ‘De combat’. Chiens qui finissent souvent délaissés dans un studio, sans jamais en sortir. Exploités dans les arènes de combat illégaux. Abandonnés dans les refuges locaux. Regardez par exemple la page des chiens à l’adoption à la SPA de Gennevilliers⁴ . Le type de race le plus commun est le Staff. Les abandons foisonnent, mais peu de personnes bienveillantes les adoptent. Et pour cause : pourquoi s’embêter avec un chien qu’on doit toujours museler ? Pourquoi privilégier un chien que même l’état français considère comme dangereux ? Personne. Merci à la loi de 1999. Ce délit de sale gueule condamne ces chiens quotidiennement. Avec leur grande mâchoire et leur musculature saillante, les Staffs, Rottweilers, Mastiff etc, font de formidables boucs émissaires. On les blâme d’absolument tous les torts. Pour prendre un exemple récent : Curtis, le chien d’Élisa. Élisa est la jeune femme qui a été retrouvée morte, mordue par une meute de chiens, alors qu’elle promenait Curtis, son Staff en forêt. Forêt où se déroulait une chasse à courre à ce moment même, menée par une meute de chiens et quelques chasseurs. Suite à ce drame, Curtis, blessé et terrorisé par ce qui venait de se passer, a été emmené à la fourrière par les autorités. Hors de question qu’il soit remis à sa famille. Les chiens de chasse qui étaient de sortie ce jour-là sont simplement rentrés dans la vénerie – sans que cela n’inquiète personne. Au contraire, les médias se sont affairés à décrire Curtis comme « un chien de combat ». Même un ‘comportementaliste’ de la Société Centrale Canine (SCC) a profité de cet événement pour signaler, sur un plateau télé⁵, que « Ces chiens sont particulièrement connus pour leur agressivité dans leur comportement interspécifique » – c’est-à-dire envers les autres espèces, et notamment l’Homme. Notez que j’ai bien mis des guillemets à « comportementaliste ». Pour moi, quelqu’un qui tient des propos aussi aberrants ne peut être considéré comme un professionnel du comportement canin. Il fait honte à cette profession. Il est d’autant plus inquiétant que cette personne travaille au sein de la SCC, qui est justement censée promouvoir et protéger toutes les races de chiens. Il a fait tout l’inverse. Un Yorkshire peut être un sociopathe autant qu’un Rottweiler peut être un bisounours À chaque incident impliquant un chien catégorisé, les médias se délectent. Ils se précipitent pour préciser que « attention, il s’agissait bien d’un chien catégorisé ! Un chien de combat ! ». Bizarrement, on entend beaucoup moins parler des incidents où des enfants sont défigurés par un Jack Russel. Car oui, cela arrive. Soyons clairs. La dangerosité d’un chien ne se mesure pas à la largeur de sa gueule, ou à la taille de ses crocs. Plusieurs facteurs peuvent rendre un chien agressif.

La génétique – faites de la consanguinité dans une lignée de champions de Ring, et vous avez de grandes chances d’obtenir un chien très déséquilibré, dès la naissance ;
Une mauvaise sociabilisation – si, à chaque fois qu’un chien croise un humain, cela se passe mal, il a de grandes chances de les appréhender ;
Une mauvaise écoute. Un chien ne mord jamais sans prévenir : il faut être attentif à ses signes d’inconfort. Ainsi, on évite les situations où mordre devient le seul moyen pour le chien de se faire comprendre.